Page:Proudhon - Du Principe fédératif.djvu/164

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de l’Autorité[1]. Au moyen âge, le rapport de l’Église et de l’État était réglé par le pacte de Charlemagne, qui tout en distinguant les deux puissances ne les isolait pas, mais les faisait égales ; de nos jours, ce même rapport s’établit d’une autre manière, plus intime et plus dangereuse, ainsi qu’on va voir.


La liberté des cultes déclarée loi de l’État, des rapports quelconques entre l’Église et l’État reconnus, il s’ensuit que tout ministre d’un culte, tout prêtre catholique par conséquent, tout évêque et tout moine, peut, en sa double qualité de citoyen et de prêtre, se faire élire représentant du peuple, être nommé sénateur, comme cela se pratique en France depuis 1848, voire même être porté à la présidence de la république, comme autrefois chez les Juifs et les Musulmans, sans que l’on puisse exciper d’aucune incapacité ou incompatibilité légale. Eh quoi ! vous avez une loi qui permet au prêtre d’accepter toute espèce de fonction gouvernementale, de mandat politique ; de devenir ministre, comme

  1. Quand Auguste Comte voulut organiser sa société, donner l’être et le mouvement à l’idée qu’il avait conçue, il s’aperçut qu’il y avait dans son système une lacune immense, la religion. Ne sachant comment remplir cet hiatus et ne voulant pas revenir au christianisme, Auguste Comte n’hésita pas : au moyen de quelques amendements il changea sa Philosophie positive en Religion positive, et de chef d’école se fit pontife. Ce qu’il y eut de plus singulier c’est qu’il emprunta à l’Église le culte même de la Vierge, qu’il déguisa sous le nom apocalyptique de La Femme. La Femme, suivant Auguste Comte, qui parle ici comme le rituel, est la source de toute grâce, Mater divina gratiæ !… Les plus positifs de ses disciples ont protesté, chose facile ; mais que mettent-ils à la place de cette faculté dont Auguste Comte avait reconnu l’importance, la religion ?