Page:Proudhon - Du Principe fédératif.djvu/94

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annexions favorisées par les annexés eux-mêmes, trafiquant de leur indépendance et de leur autonomie.


Il en est autrement dans le système fédératif. Très-capable de se défendre si elle est attaquée, les Suisses l’ont plus d’une fois fait voir, une confédération demeure sans force pour la conquête. Hors le cas, fort rare, où un État voisin demanderait à être reçu dans le pacte, on peut dire que, par le fait même de son existence, elle s’interdit tout agrandissement. En vertu du principe qui, limitant le pacte de fédération à la défense mutuelle et à quelques objets d’utilité commune, garantit à chaque État son territoire, sa souveraineté, sa constitution, la liberté de ses citoyens, et pour le surplus lui réserve plus d’autorité, d’initiative et de puissance qu’il n’en abandonne, la confédération se restreint d’elle-même d’autant plus sûrement que les localités admises dans l’alliance s’éloignent davantage les unes des autres ; en sorte qu’on arrive bientôt à un point où le pacte se trouve sans objet. Supposons que l’un des États confédérés forme des projets de conquête particulière, qu’il désire s’annexer une ville voisine, une province contiguë à son territoire ; qu’il veuille s’immiscer dans les affaires d’un autre État. Non-seulement il ne pourra pas compter sur l’appui de la confédération, qui répondra que le pacte a été formé exclusivement dans un but de défense mutuelle, non d’agrandissement particulier ; il se verra même empêché dans son entreprise par la solidarité fédérale, qui ne veut pas que tous s’exposent à la guerre pour l’ambition d’un seul. En sorte qu’une confédération est tout à la fois une garantie pour ses propres membres et pour ses voisins non confédérés.