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ÉVOLUTION HISTORIQUE

siècle. Il n’eût pas eu d’égaux, et son nom aurait atteint le plus haut degré de la célébrité, si. à la passion de l’art et à la grandeur du talent, il avait joint la netteté de l’idée. J’ai rapporté précédemment (chap. m) la définition de l’idéal d’E. Delacroix ; elle est inintelligible : tout ce qu’on en peut saisir est que Delacroix appelait idéal tout ce qui frappait son imagination, et dont il s’efforçait à son tour, à l’aide du pinceau, de frapper l’imagination du spectateur. Ce qui revient à dire que l’idéal, selon E. Delacroix, est une impression personnelle à l’artiste, et l’art une expression de sa subjectivité. -Il disait encore : « La peinture n’est autre chose que l’art de produire l’illusion dans l’esprit du spectateur, en passant par ses yeux.» Cette proposition n’est pas plus claire que l’autre ; mais on y distingue encore ceci, que le peintre est un magicien qui fait illusion aux gens. La manière dont il rendait compte de son romantisme revient à cela : « Si l’on entend par mon romantisme la libre manifestation de mes impressions personnelles., je dois avouer que je suis romantique depuis l’âge de quinze ans. »

Mais, artiste, répondrai-je à M. Delacroix, je me soucie fort peu de vos impressions personnelles, sans compter que je vous délie de produire en moi la moindre illusion, à moins que vous ne trouviez le secret de rendre mon imagination complice de la vôtre. Or, pour entraîner mon imagination, la première condition, je