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ÉGYPTE : ART TYPIQUE

Est-ce là l’ouvrier au dix-neuvième siècle ? dites-vous en voyant les Casseurs de pierres. Non, pas tout à fait, assurément ; c’est une des scènes de sa vie, une des fatalités de son existence ; la conclusion d’une vie de travail mal salarié, mal servi par l’intelligence, sans dignité, sans élévation. A cela vous répondez : Très bien. Mais que M. Courbet nous fasse à cette heure, dans sa beauté virile et sa dignité intelligente, l’OUVRIER !

Où voulez-vous qu’il le prenne ? Un ignorant vous peindra un bel homme, à nez aquilin, barbe noire et pleine, au torse de Milon, aux bras d’athlète, un front de génie par-dessus le marché, avec l’éclair de la liberté dans les veux. Il lui mettra un marteau à la main, et vous direz : Voilà l’ouvrier.

Mensonge : c’est une figure de fantaisie, de la pose. J’en ai vu de ces ouvriers, bons diables au fond, mais qui déjà posaient comme types, comme si leur image, fixée par le pinceau, eût dû passer à la postérité. Et je pensais en les regardant : Pose, mensonge.

Quant à moi, je l’avoue, j’ai horreur du mensonge, de la fiction, de la convention, de l’allégorie, de l’hypocrisie, de la flagornerie, aussi bien dans la peinture que dans la politique et dans le style ; je ne veux pas plus être le flatteur des masses que celui des princes ; et s’il est vrai, comme tout le monde le reconnaît, que nous vivions à une époque de décadence, où le courage