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ÉVOLUTION HISTORIQUE

Sésostris ; mais j’ai peine à me figurer qu’ils eussent été capables d’une pareille ânerie. Quoi ! sur cette place révolutionnaire, qui a changé déjà deux ou trois fois de nom, où tant de grandes scènes se sont passées, nous n’avons su élever que deux fontaines mythologiques, assez jolies du reste, et un obélisque égyptien !...

Nos arts sont du bric-à-brac. Nous faisons d’une église un panthéon aux grands hommes ; nous inscrivons sur le frontispice de cette église une dédicace usurpatoire, menteuse ; car l’église de Soufflot a été dédiée à sainte Geneviève ; c’est la deuxième cathédrale de Paris. Par contre, nous refaisons du temple de la Gloire, parallélogramme imité des Grecs, une prétendue église (la Madeleine), sans cloches, sans chapelles, sans horloge, sans forme chrétienne. L’ensemble de nos monuments dénote un peuple dont la conscience est vide et la nationalité morte. Nous n’avons rien dans la conscience, ni foi, ni loi, ni moralité, ni philosophie, ni sens économique, mais faste, arbitraire pur, contre-sens, déguisement, mensonge et volupté.

Traversez le pont de Solferino, et demandez-vous ce qu’il fait là. Une simple passerelle pour les piétons suffisait : elle leur eût épargné quelque cent mètres pendant que le jardin des Tuileries est ouvert. Mais le pont est bien bâti, d’une belle coupe et paraît solide :