dote la nature par le spectacle de ses créations ; si tout notre savoir était inscrit d’avance dans les choses et dans leurs rapports, nous n’aurions que faire de l’art et des artistes. La contemplation de l’univers suffirait à notre âme ; notre langage, s’y conformant, pourrait augmenter indéfiniment son dictionnaire ; mais, quant à sa constitution, à ses formes, à sa poésie, il s’immobiliserait ; notre idéalisme ne se distinguerait pas de notre philosophie, et notre art se bornerait à des reproductions photographiques.
Mais la nature ne nous a pas tout dit ; elle n’a pas tout pensé, elle ne sait pas tout ; elle ne sait rien de notre vie sociale, qui est à elle seule un monde nouveau, une seconde nature ; elle ne peut rien nous apprendre de nos rapports, de nos sentiments, du mouvement de nos âmes, de l’influence changeante qu’elle exerce sur nous, des aspects nouveaux sous lesquels nous la voyons, des changements que nous lui faisons subir à elle-même. Tout cela nous suggère incessamment de nouvelles idées, de nouvelles idéalités, pour lesquelles il nous faut des expressions nouvelles, un langage nouveau, langage non-seulement philosophique, mais esthétique. Tâchons de rendre ceci clair.
Pour le philosophe ou savant, l’expression, formulée par la parole ou le signe, bien que naturellement imparfaite, doit être, autant que possible, adéquate à l’idée, précise, rigoureuse. La langue du droit, celle des