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ÉVOLUTION HISTORIQUE

On sait comment ce singulier problème fut résolu. De même que les artistes égyptiens, les Grecs eurent recours à une généralisation. Seulement, au lieu de s’en tenir à un type générique, embrassant la race entière, ils observèrent les sujets selon leurs catégories : hommes et femmes d’abord ; enfants, jeunes gens et vieillards ; plébéiens et nobles ; paysans, pêcheurs, chasseurs, athlètes, guerriers et bergers, les plus beaux, les mieux faits que l’on put trouver ; et de ces observations, relatives non-seulement au type ethnique, mais aux qualités individuelles, aux caractères de classes, à tout ce qu’il y a de plus difficilement saisissable dans la physionomie, on fit les dieux. Ces dieux n’étaient que des combinaisons imaginaires de traits empruntés à plusieurs sujets ; des créations tout aussi impossibles que les types égyptiens : n’importe, ils devinrent types de beauté, règle de proportion, ou canon pour les artistes. Ainsi chaque dieu et déesse eut, avec sa figure, sa beauté propre et authentique, qui, une fois fixée, ne varia plus. Tout se modela sur les dieux : architecture, musique, etc., et l’art grec fut créé. Comme en Egypte, sous l’influence de la religion nationale, dé la liberté et de ses institutions, il se forma un idéal commun, une esthétique générale, une tradition, une puissance de collectivité enfin, qui, pendant sept ou huit siècles, remplit de chefs-d’œuvre le monde gréco-romain. Telle fut l’origine de