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ÉGYPTE : ART TYPIQUE

disent que la comédie nous châtie par le ridicule, castigat ridendo mores. Généralisons cette double définition, et disons que l’art, dans son universalité, poésie, statuaire, peinture, musique, roman, histoire, éloquence, aussi bien que comédie et tragédie, a pour mission de nous porter à la vertu et de nous relever du vice, tantôt en châtiant, tantôt en encourageant notre amourpropre par de fidèles et expressives représentations de nous-mêmes, castigat pingendo mores, aut erigit. L’échelle de l’idéal va du ciel aux enfers ; et tout ce que l’imagination y rencontre est du domaine de l’artiste.

L’art grec finit avec le polythéisme, avec l’idolâtrie. Cela ne pouvait manquer d’arriver. La civilisation avait été portée par lui à un degré auparavant inconnu ; le sens moral ayant faibli, elle trouva dans ce même art l’agent principal de sa dissolution. La fin des persécutions contre l’Évangile fut le signal de sa déchéance : la catastrophe arriva quatre siècles plus tard. En 726, sous le règne de Constantin Copronyme, un concile de plus de trois cents évêques fut assemblé à Constantinople, dans lequel le culte des images fut absolument condamné. Ainsi, non content de briser les antiques idoles, on brisait l’art, en défendant de faire des images même du Christ, des anges, des vierges et des saints. La haine de l’idolâtrie atteignit jusqu’à la peinture et à la statuaire ; le peuple qui s’était