Mais, monsieur le ministre, il en est des éléments politiques comme des corps simples : combinés dans certaines proportions, ceux-ci donnent des composés chimiques dont les propriétés sont totalement différentes de celles des principes constituants. Trente-trois parties d’oxygène et soixante-sept d’hydrogène donnent l’eau, corps liquide, étouffant, anti-phlogistique, formé de la combinaison de deux gaz, l’un, seul respirable, l’autre éminemment combustible.
Ainsi, dans l’ordre politique, les institutions changent par l’accession de nouveaux éléments ; malheureusement la société n’a pas toujours conscience de la métamorphose qui s’opère en elle. De là un bouillonnement extraordinaire, et parfois des résistances périlleuses au sein des nations. Si l’idée nouvelle vient d’un individu, elle soulève contre lui la réprobation générale ; si elle part du pouvoir, elle excite les frémissements du peuple et de longues agitations dans les masses. Le ministère l’a éprouvé naguère dans l’affaire du recensement.
Mêlée de démocratie pure, la monarchie absolue a produit selon la différence des doses, les variétés de gouvernement constitutionnel que l’on voit en Angleterre et en France ; attribuée tour à tour au prince ou à la nation, l’élection d’un Sénat, corps de sa nature aristocratique, donne soit une chambre des pairs, soit une chambre des députés, assemblées souveraines dans lesquelles ne se trouve plus rien d’oligarchique ni de féodal. Pareillement, introduisez dans la diplomatie et la cabale parlementaire l’élément scientifique et la méthode, et vous arriverez bientôt à un système de gouvernement vrai, débarrassé de toutes les guerres de partis, de toutes les intrigues d’opposition.
La propriété, selon M. Rossi, est un monopole, mais un monopole nécessaire. Or, voici la glose que je fais sur cette définition du savant auteur. Mélangez d’intérêt général, jusqu’à pleine saturation, cette propriété monopole, et vous aurez un principe nouveau, analogue, non identique, au droit de possession et d’usage, connu des vieux jurisconsultes.
Ce phénomène de composition politique est précisément