Page:Proudhon - Idée générale de la Révolution au dix-neuvième siècle.djvu/307

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Reconnaîtra-t-on un Dieu ?

Y aura-t-il une Religion ?

Cette Religion sera-t-elle servie par des prêtres ?

Ces prêtres seront-ils salariés par l’État ?

Voulez-vous, en quatre jours, que la contre-révolution soit faite, parfaite, satisfaite ? Ne parlez au Peuple ni de Roi, ni d’Empereur, ni de République, ni de Réforme agraire, ni de Crédit gratuit, ni de Suffrage universel. Le Peuple sait à peu près ce que tout cela signifie ; il connaît, sur chacun de ces points, ce qu’il veut et ce qu’il ne veut pas. Faites comme Robespierre : interrogez le Peuple sur l’Être-Suprême et l’Immortalité de l’âme...


3. Justice.


Justice, Autorité, termes incompatibles, mais que le vulgaire s’obstine à faire synonymes. Il dit autorité de justice, de même que gouvernement du peuple, par habitude du pouvoir, et sans apercevoir la contradiction. D’où vient cette dépravation d’idées ?

La justice a commencé comme l’ordre, par la force. Loi du prince à l’origine, non de la conscience ; obéie par crainte, non par amour, elle s’impose plutôt qu’elle ne s’expose : comme le gouvernement, elle n’est que la distribution plus ou moins raisonnée de l’arbitraire.

Sans remonter plus haut que notre histoire, la justice était au moyen âge une propriété seigneuriale, dont l’exploitation tantôt se faisait par le maître en personne, tantôt était confiée à des fermiers ou intendants. On était justiciable du seigneur comme on était corvéable, comme on est encore aujourd’hui contribuable. On payait pour se faire juger, comme pour moudre son blé et cuire son pain : bien entendu que