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CHAPITRE III


CONSÉQUENCES DE LA DOCTRINE PROFESSÉE PAR LES AUTEURS, RELATIVEMENT AU DROIT DE LA FORCE


Je ne connais pas de spectacle plus intéressant que celui de la raison philosophique aux prises avec la raison populaire : la première définissant, analysant, composant, raisonnant et concluant, avec une dignité magistrale, contre ce qu’elle nomme préjugé ; la seconde, ne sachant ni plaider ni se défendre, incapable de pousser un argument, de formuler une objection, ne sachant jamais répondre, à toutes les difficultés qu’on lui oppose, que ces mots naïfs : Est, est ; Non, non ; Cela est, cela n’est pas ; puis, cela dit, se jouant de la science des doctes comme d’une toile d’araignée, et entraînant dans sa pratique la civilisation et le monde.

Une chose généralement reconnue, parce qu’elle est un fait d’expérience, c’est que la civilisation a eu pour point de départ l’antagonisme, et que la société, en autres termes le droit, droit international, droit public, droit civil, s’est développé sous l’inspiration et l’influence de la guerre, ce qui veut dire sous la juridiction de la force.