Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 1, 1869.djvu/192

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connaître la justice qui a présidé à l’organisation des tribunaux ; pas plus que l’adultère n’est un argument contre le mariage, ou le dol et le manque de parole un argument contre l’utilité et la moralité des contrats.

C’est ce sentiment invincible d’un droit impliqué dans la guerre, qui tout d’abord a fait entourer celle-ci de formalités nombreuses, qui en a posé les conditions et réglé les conséquences, comme s’il s’agissait d’un débat judiciaire. Par exemple, c’est un fait universel que la condition faite au vaincu est moins bonne que celle qu’il eût obtenue par une soumission volontaire, et cela est encore de toute justice. Ici le battu, comme le plaideur qui succombe, paye les frais ; l’aggravation de son sort est la compensation du dommage qu’il a causé, par sa résistance, au vainqueur.

On comprend, et il est bon que je le redise, afin d’ôter tout prétexte à la calomnie, qu’il ne peut être question ici de justifier toute espèce de guerre, pas plus que d’excuser ou d’approuver tout ce qui se fait à la guerre. Il en est de ce droit comme de tous les autres, dont la reconnaissance ne légitime en aucune façon les abus. Le cœur de l’homme est plein de passions ; ses œuvres sont impures ; mais le droit est saint, aussi bien dans la guerre que dans le travail et la propriété.

Les circonstances dans lesquelles le droit de la force devient applicable et par conséquent la guerre légitime, comme action en revendication de ce droit et solution d’un litige international, sont de plusieurs genres ; nous noterons les quatre principaux:


Incorporation d’une nation dans une autre nation, d’un état dans un autre état ; absorption ou fusion de deux sociétés politiques. — C’est le cas qui nous a servi d’exemple ; c’est le premier qui se présente, et le plus important, sinon