Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 1, 1869.djvu/222

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à sa loi et à sa foi, et sont bientôt absorbés par les populations indigènes.

Quels états peuvent naître aujourd’hui de la dissolution de l’empire turc, et être considérés, d’après le droit des gens tel que nous l’avons enfin défini, comme ses héritiers naturels ? En deux mots, comment et au profit de qui va s’opérer le démembrement ?

Deux hypothèses se présentent :

Ou bien ce sont les nationalités jadis conquises par les Turcs, et depuis réduites en servage, qui vont se substituer à leurs dominateurs et se reformer en corps politiques, comme l’ont fait, il y a trente-cinq ans, les Grecs de la Péninsule et d’une partie de l’Archipel, sous la protection des puissances de l’Europe ; comme viennent de le faire la Moldavie et la Valachie : chose facile encore pour la Servie, la Bulgarie, la Roumélie, le Monténégro ; plus difficile peut-être pour les provinces d’Asie, où les Turcs sont plus nombreux et plus près du foyer islamique.

Ou bien ce seront les états voisins de la Turquie, Russie, Autriche, Provinces danubiennes, Grèce, Égypte, France et Angleterre, qui se porteront héritières en vertu du droit de prépotence, d’après lequel tout État en qui la vie politique fait défaillance est incorporé par le voisin en qui réside la force. Le partage de la Pologne, au siècle dernier, en est un exemple. La dissolution politique de la Pologne étant admise comme un fait sans remède, attendu que la force de l’État résidait tout entière dans l’aristocratie, et que, cette aristocratie dissoute, il n’y avait pas au-dessous d’elle de classe avec laquelle on pût reformer un État, le partage s’ensuivit entre les trois États voisins, Russie, Autriche et Prusse.

L’intérêt qui s’attache en ce moment au principe de nationalité semble au premier coup d’œil devoir faire donner la préférence à la première de ces solutions, qui ne