Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 1, 1869.djvu/242

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Le droit des gens a son principe dans cette considération que, d’état à état, et dans certaines conjonctures, la force faisant positivement le droit, il est possible, en cas de litige entre deux états, de déterminer à priori, par l’évaluation des forces, à laquelle des deux parties doit appartenir la prépondérance ; conséquemment de prévenir, par une transaction amiable, la décision de la guerre, à tout le moins de définir les effets de la victoire et de rendre plus équitable le traité de paix.

Si le litige est de nature et de gravité telles, que la solution exige le sacrifice de l’une des souverainetés belligérantes, le droit des gens nous enseigne, et c’est là ce qui le distingue éminemment de tout autre droit, ce qui fait de lui une des catégories les mieux tranchées de la science de la justice, que ce sacrifice peut être requis par celle des puissances qui se croit la plus forte, et exécuté par les armes. Tout ce qui, dans les rapports internationaux, peut se ramener à une question de vie ou de mort pour l’état à décider par la force, fait partie du droit des gens.

Venons maintenant au droit public ou droit politique.

Le droit politique a pour but de prévenir toute espèce d’agression de l’individu contre la communauté ou contre les individus, en définissant, autant que possible, les droits et devoirs des citoyens les uns envers les autres et envers l’état, et les plaçant tous sous la protection et l’autorité d’une force publique qui est le gouvernement.

Mais il y a cette différence entre le droit international et le droit politique, que le premier implique essentiellement l’éventualité de l’absorption des états les uns par les autres, et par conséquent, en cas de conflit, la légitimité de leur immolation ; tandis qu’en droit politique ni la souveraineté de l’État, ni la liberté du citoyen ne peuvent périr ; loin de là, le chef-d’œuvre de la constitution est de faire qu’elles croissent sans cesse l’une à côté de l’autre