Le général historien nous les révèle, en faisant voir par le menu, comment cette célèbre campagne ne fut, du commencement à la fin, par la faute des généraux ennemis encore plus que par l’habileté du général Bonaparte, qu’une sorte de dérision de la loi des forces ; — comment les Autrichiens se divisant, par nécessité ou imprévoyance, en une multitude de petits corps, se faisaient détruire en détail, malgré la supériorité de leurs forces, par un ennemi plus agile et toujours concentré ; — comment, lorsque les armées en présence étaient d’égale force, les résultats devenaient nuls, ainsi qu’on le vit à Arcole ; lorsque les Autrichiens se trouvaient en nombre, ils triomphaient à leur tour, comme aux combats de Salo et de la Corona ; — comment en mainte circonstance le salut de Bonaparte et de son armée tint à un hasard, à une méprise de l’ennemi, à la bonhomie autrichienne, à une rouerie, qu’on me passe le mot, du général français ; — comment, à Rivoli, dix minutes de retard auraient fait perdre à celui-ci la plus belle et la plus décisive de ses victoires ; — comment, en résultat, ces victoires merveilleuses, mais où l’habileté, l’adresse du batailleur, avaient plus de part que la force réelle, n’aboutirent qu’à une conquête précaire ; — comment, dès l’année suivante, 1798, l’Italie conquise par une force inférieure nous échappait, ce qui amenait en 1800 une nouvelle campagne d’Italie et une autre sur le Rhin ; — comment, pour consolider une domination douteuse, Napoléon fut entraîné, par des conquêtes du même genre, à s’étendre toujours davantage ; — comment, enfin, ce grand capitaine, méconnaissant de plus en plus les vrais principes de la guerre et la loi des forces, après avoir réuni à son empire, par des incorporations mal entendues, la moitié de l’Europe, succomba sous l’avalanche de ces forces soulevées, et laissa après sa chute la France moindre qu’il ne l’avait prise.