Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 1, 1869.djvu/59

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Il est certain que chez Napoléon la passion de légiférer fut égale au moins à celle de batailler : il eut cela de commun avec tous les conquérants. Il y a plus : les nations les plus belliqueuses, que nous avons signalées déjà comme les plus théologiques, sont en même temps les plus justicières. Qu’eût été la civilisation sans la conquête romaine, ce qui veut dire, sans le droit romain ? Que serait devenu le christianisme, sans le pacte de Charlemagne ? Quel a été, depuis cette alliance célèbre du glaive et de la tiare, le plus grand acte de la société européenne ? Le traité de Westphalie, qui sur l’opposition des forces, et sous la protection du dieu des armées, jeta les fondements de l’équilibre universel. Malheur aux publicistes qui ne savent comprendre ces choses ! Malheur aux nations qui les méconnaissent ! En ôtant au droit cette base antique de la force, il y a lieu de croire qu’on ferait du droit un pur arbitraire ; au lieu de la paix, de la richesse et de la félicité, nous aurions rencontré l’atonie, l’atrophie et la dissolution.