Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/16

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rope ont aboli entre elles cet usage, qui n’est pas dans les voies de la force ouverte. »

Quant aux boissons et aliments, Grotius réprouve le poison, tout en reconnaissant qu’il est permis de rendre les eaux impotables en y jetant des cadavres, de la chaux, comme aussi de dénaturer, par des moyens analogues, les comestibles.

Vattel partage sur ce point l’avis de Grotius.

Ici paraît l’incertitude des principes du célèbre juriste. La guerre a-t-elle pour but direct la destruction de l’ennemi ? Dans ce cas, point de scrupules : les mines, les machines infernales, l’huile de vitriol, l’eau bouillante, le poison, la chaux, les charognes, la dyssenterie, l’aveuglement, la famine, la peste, les flèches à crochet ou empoisonnées, tout ce qui produit d’incurables blessures comme ce qui tue sur-le-champ, il faut tout prendre, faire comme on dit, flèche de tout bois.

Mais la guerre est-elle avant tout, comme le dit son nom latin et comme le porte sa définition, un duel de la force et de la vaillance, dans lequel la mort apparaît comme un risque, non comme une fin ? Il est évident qu’alors il y a lieu à un règlement d’armes, sans quoi la guerre n’est plus qu’une lutte hideuse entre une armée de Castaings et une autre armée de Brinvilliers. Je n’aime point ce général qui, dans un combat de mer, ayant fait provision de vipères renfermées dans des bouteilles, les fit jeter par ses soldats dans les vaisseaux ennemis, cherchant ainsi, par une espèce de trahison, ce qu’il désespérait d’obtenir par la force. Et je regarde comme digne du supplice des assassins le soldat qui mord sa balle, dans l’idée que cette morsure empoisonne le projectile et tuera infailliblement l’ennemi.

Nos militaires, il faut leur rendre cette justice, ont gé-