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Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/196

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gantesque répondit une ambition non moins colossale. Si l’Angleterre bloque le monde avec ses vaisseaux, le monde ne saurait-il bloquer l’Angleterre en lui fermant ses ports ?… Le blocus continental, en attendant la descente, ajournée à des temps meilleurs, fut la grande pensée de Napoléon. L’Angleterre, qui en rompant le traité d’Amiens avait cru prévenir la conquête de l’Europe, ne fit que la précipiter. Après avoir incorporé dans son empire l’Italie, la Belgique et la Hollande, Napoléon fut conduit à incorporer encore le Portugal, l’Espagne, la Westphalie, le Hanovre, les villes hanséatiques et toute la confédération germanique. Il n’eût pas manqué, s’il en eût eu le temps, de mettre la main sur Constantinople, la future capitale du monde, disait-il. Il n’eût su, à moins, affamer l’Angleterre.

Maintenant le continent, rendu à lui même, ne ferme plus ses ports aux Anglais ; il se contente de leur opposer des tarifs et de leur faire concurrence. A quoi les Anglais répliquent en organisant leur propagande libre-échangiste, dans laquelle ils ont naturellement pour auxiliaires tous ceux qui, pourvus de monopoles naturels ou confectionnant eux-mêmes à très-bas prix, ne demandent pas mieux que d’acheter au meilleur marché possible et leurs matières premières, et tous les objets dont ils ne sont pas eux-mêmes débitants, la fortune et l’indépendance de leur pays dussent-elles y périr. Mais que Napoléon III, qui a jugé à propos d’essayer du libre échange, s’avise de demander à l’Angleterre, qui dans ce moment appuie de toutes ses forces l’indépendance des Italiens, la même indépendance pour les Irlandais, les Hindous, etc., plus l’évacuation et la démolition de ses forteresses, le tout comme condition et garantie d’une entière liberté d’échanges, je voudrais savoir ce que répondraient à cette interpellation catégorique MM. Bright et Cobden ?