Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/341

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tienne. A qui la faute maintenant, si les esprits sont à la guerre ? La politique de nos meneurs est comme leur conscience : elle n’a pas de principes. Leur parole sème le vent, et nous recueillons la tempête.

L’humanité est comme un vaste cerveau dans lequel toute pensée s’agite, mais où la vérité finit toujours par triompher de l’erreur. La France tient entre ses mains la paix et la guerre. Aucune puissance ne songe à l’attaquer ; toutes la craignent au contraire et s’en méfient : ce qui ne doit pas être pour elle un sujet d’orgueil. Ce que la France aura décidé arrivera. L’évolution guerrière est à sa fin : cela résulte de toutes nos recherches. Voulons-nous la recommencer cette évolution ? D’après les principes que nous avons successivement posés, l’analyse que nous avons faite des motifs et des causes, la situation à laquelle l’Europe est parvenue, il n’existe pas, à cette heure, un seul cas rationnel de guerre. La politique de guerre est épuisée, et nous savons à quoi nous en tenir sur la question économique. Mais tout peut servir de prétexte : que choisissons-nous ? Le mouvement de 1814-1815, continuant le mouvement de 1789 et amenant celui de 1830-1848, a produit tout ce que nous voyons : les guerres qui se sont faites depuis dix ans n’y ont rien ajouté de fondamental ni même d’utile. Tout ce qu’ont valu à la civilisation, à l’équilibre européen, au progrès du droit, les campagnes de Crimée et de Lombardie, pouvait être obtenu sans frais. Allons-nous reprendre 1848 ou continuer 1859 ? Je pose la question tout à la fois aux républicains de février et aux conservateurs qui s’étaient d’abord ralliés à la république. Quand la France, toute-puissante par la pensée et par l’exemple, ne tire plus de fruit de ses victoires, renoncerons-nous à la pensée pour courir aux armes ?

Au reste, quelle que soit la décision des hommes, nous pouvons être sans inquiétude sur les événements. Les