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Page:Proudhon - La Révolution sociale démontrée par le coup d’État du 2 décembre.djvu/132

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gine, la tradition et la raison. L’élection du 10 décembre avait été pour le clergé l’occasion d’une campagne contre les infidèles ; l’expédition de Rome, faite à son bénéfice, ne l’avait pas trouvé moins ardent ; et dans le coup d’état qui écrasait le socialisme il voyait une manifestation de la Providence. Avec ce système d’interprétation providentielle, l’Église sert qui elle veut, autant qu’il lui convient ; elle n’est jamais embarrassée dans ses panégyriques et ses anathèmes. Elle chante pour tous les pouvoirs, suivant qu’ils concourent à ses desseins, jure par tous les principes, aujourd’hui affirmant la souveraineté du peuple, Vox Populi, demain le droit divin, Vox Dei. Elle seule a le privilège de prêter serment sans engager sa conscience, comme de donner, à qui bon lui semble, le bon Dieu sans confession. Sa subjectivité l’élève au-dessus de toute loi. Le Président de la République, dont la foi ne dépasse pas sans doute celle du charbonnier, n’a pas regardé à l’intention : il s’est montré reconnaissant. Après le Panthéon, il a livré au clergé les collèges, déclaré les cardinaux de plein droit membres du Sénat, rétabli les aumôniers dans les régiments, supprimé, à la satisfaction des jésuites, les chaires de philosophie, l'école normale, pépinières d’idéologues ; assigné aux vieux vicaires une pension de retraite sur les biens d’Orléans, etc. Pouvait-il moins pour ses fidèles alliés ?... Soyons donc justes, et bien que la philosophie soit en interdit, considérons les choses philosophiquement.

Certes Louis-Napoléon, en donnant au clergé des marques si éclatantes de sa gratitude, n’a voulu autre chose que se conserver, en face des partis