Page:Proudhon - La Révolution sociale démontrée par le coup d’État du 2 décembre.djvu/160

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seront pris dans la majorité ; le progrès sera représenté par l’opposition, qui, grandissant tous les jours, deviendra, au moment utile, majorité à son tour et ministère.

Tel fut le système inauguré en 1830, et qui, par la mauvaise foi du prince et le scandale des intrigants qui en eurent la direction, aboutit, longtemps avant l’époque où il devait naturellement finir, à la catastrophe de février. Suivant la loi qui en faisait la base, ce régime de liberté progressive tendait, par la démocratie, à la réduction continuelle de l’organisme politique, et à son absorption dans l’organisme économique. Cette tendance, inhérente, autant que la séparation des pouvoirs, à tout gouvernement libre, les querelles de parti, les dérisions de la tribune, les envahissements de l’autorité centrale, les hontes du règne, la firent perdre de vue. De dégoût les esprits tournèrent à l’utopie, et les romanciers aidant, on en vint à se prendre de passion, qui pour la féodalité ou le suffrage universel et direct, qui pour le comité de salut public ou pour l’empire, qui pour Platon, qui pour Panurge. C’est dans cet état de l’opinion qu’apparut la république, et qu’en moins de quatre ans la France a pu jouir de deux constitutions.

Maintenant qu’a voulu le 2 décembre ? Servir la révolution, et dans ce but organiser, sous le contrôle populaire, un pouvoir dictatorial ? la constitution du 15 janvier n’en dit mot : elle ne laisse apercevoir, sous des apparences empruntées à la théorie représentative, que l’exorbitance de la prérogative présidentielle, sans donner la moindre raison de cette exorbitance. Fonder un état régulier,