Page:Proudhon - La Révolution sociale démontrée par le coup d’État du 2 décembre.djvu/234

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sont en général bien combinées ; bien jouées, supérieurement gagnées, ou brillamment perdues. Il ne s’agit point ici de l’individu, dans son métier de héros ; il s’agit de l’homme politique. C’est comme conceptions politiques qu’il faut juger les expéditions d’Egypte et de Saint-Domingue : elles ont échoué, parce que l’inspiration publique avait complètement manqué à la première, et qu’une entreprise de cette importance devait jaillir exclusivement de la raison nationale ; parce qu’ensuite le souffle révolutionnaire avait fait défaut à la seconde, et qu’il était absurde, criminel, de remettre les Haïtiens dans les fers, en vertu de la déclaration des droits de l’homme.

Malgré ce double insuccès, malgré ses travers d’administration et de police, déjà trop apparents, le premier Consul réussit néanmoins ; et jusqu’à la rupture du traité d’Amiens, son gouvernement, réparateur et pacificateur, fort de l’adhésion générale, est fécond et prospère. Mais l’Empereur, affranchi de la tutelle de l’opinion et des lisières constitutionnelles, tombe de faute en faute, et bientôt d’insuccès en insuccès. La chronologie nous en a fait toucher la raison : cette tête olympienne, impatiente de la voix publique, et qui voulait penser toute seule, finit par ne rien penser du tout !...

Ramenée à ses véritables termes, la comparaison entre les deux Bonaparte peut donc se suivre. Louis-Napoléon, il est vrai, n’a pas gagné de batailles : qui sait s’il n’en gagnerait pas ? Mettez en présence deux armées, deux généraux. L’un des deux sera nécessairement vainqueur, l'autre vaincu ; le pre-