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cielle par une autre plus en harmonie avec les besoins et les idées, nullement d’abandonner un si grave intérêt à l’arbitre des consciences ; qu’en attendant il était de bonne politique d’appeler les prêtres à la bénédiction des drapeaux de la liberté et aux funérailles de ses martyrs ; si, dis-je, tel devait être le jugement de la démocratie sur l’importance des cultes, alors on avait eu tort de chasser la dynastie d’Orléans ; il fallait s’en tenir à la reforme demandée par M. Duvergier de Haurane, appuyer simplement MM. Odilon Barrot et Thiers. La théorie démocratique de la liberté est incompatible avec la doctrine théologique de la grâce : il faut choisir entre Augustin et Pélage, deux maîtres qui s’excluent réciproquement. Point de révolution dans l’Église, point de république dans l’état.

Pour moi, j’avais une telle foi dans la moralité du peuple, malgré l’influence délétère du paupérisme, que je n’eusse point hésité à appuyer la liberté la plus entière, et en respectant les croyances individuelles, à mettre définitivement la religion hors de l’état, c’est-à-dire d’abord, hors du budget. Et certes, l’opinion des chefs de la démocratie sur l’importance ultérieure des idées religieuses ne peut non plus être un doute pour personne : leur principe leur défendait d’avoir du peuple une opinion si dégradante.

Mais ils n’osèrent assumer la responsabilité d’une décision aussi grave ; ils crurent devoir en référer à la nation. Nous ne sommes pas le souverain, pensaient-ils ; la religion est une de ses propriétés ; il ne nous appartient pas de préjuger les dispositions de sa conscience, encore moins d’attirer sur la dé-