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Le comprendrons-nous, enfin ? Depuis le jour où Luther brûla publiquement à Wittemberg la bulle du pape, il n’y a plus de confession de foi, plus de catéchisme possible. La légende chrétienne n’est plus que la vision de l’Humanité, ainsi que l’ont exposé tour à tour, après Kant et Lessing, Hegel, Strauss, et en dernier lieu Feuerbach. C’est là la gloire de la Réforme ; c’est par là qu’elle a bien mérité de l’Humanité, et que son œuvre, en reprenant celle du Christ, déjà trahie par les constituants de Nicée, surpasse celle de son auteur.

De même que toute philosophie depuis Bacon se réduit à cette règle, Observer avec exactitude, analyser avec précision, généraliser avec rigueur ; pareillement toute religion depuis Luther se réduit à ce précepte, formulé par Kant, Agis de telle sorte que chacune de tes actions puisse être prise pour règle générale. Au lieu de dogmes, au lieu d’un rituel, ce que nous voulons désormais, pour la raison et pour la conscience, c’est une règle de conduite. Laissons donc cette manie de substitutions : ni l’église d’Augsbourg, ni celle de Genève, ni aucune confrérie de quakers, moraves, mômiers, francs-maçons, etc., ne remplacera jamais l’Église romaine. Tout ce que l’on entreprendrait à cet égard serait contradictoire et rétrograde ; il n’y a pas, au fond de la pensée humaine, de nouvel édifice religieux : la négation est éternelle.

De la religion, venons à la politique.

Lorsque Jurieu, appliquant au temporel le principe que Luther avait invoqué pour le spirituel, eut opposé au gouvernement de droit divin la souveraineté du peuple, et transporté la démocratie de