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lui. La Montagne et l’Élysée font corps, la fusion paraît complète.

On a critiqué ce dernier vote des Montagnards : à mon avis, c’est sans justice. Déjà ils étaient dominés, absorbés : une volte-face du côté de la majorité n’eût servi qu’à rendre la situation plus compliquée, plus périlleuse, sans rien enlever de ses avantages au Président.

Par la proposition de rappel, ne l’oublions pas, Bonaparte était devenu le défenseur armé du suffrage universel ; la faveur du peuple pour lui, en ce moment, était au niveau du 10 décembre 1848. Lui ôter le commandement de l’armée, et livrer ce commandement au général Changarnier, à la contre-révolution, c’était pour la Montagne une inconséquence qu’expliquait sans doute la haine de l’homme, mais inexcusable devant la logique. Or, c’est la logique qui mène les affaires ; le sentiment n’y est qu’une cause de déception. On a dit que, le Président renversé, la Montagne aurait eu bon marché d’une majorité impopulaire. Peut-être : le 2 décembre a fait voir comment l’armée observe la discipline, et Changarnier, armé d’un décret de l’Assemblée, n’eut pas moins fait de besogne que Saint-Arnaud. Mais qui ne voit que si la Montagne se fût tournée contre le Président, le Président, résolu à ne pas céder, se serait insurgé au nom du suffrage universel contre l’Assemblée, que le peuple se serait joint à celui qui portait le drapeau de ses droits ; que la Montagne n’aurait pu suivre jusqu’au bout les conséquences de son vote, et aurait fini par se rallier à Bonaparte : qu’alors, son inconséquence eût éclaté au grand jour ; et