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Page:Proudhon - Les Confessions d'un révolutionnaire.djvu/237

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Ah ! race vaniteuse et servile que nous sommes ! qui payons 1,800 millions par an les folies de nos gouvernants et notre propre honte ; qui entretenons 500,000 soldats pour mitrailler nos enfants ; qui votons des bastilles à nos tyrans, afin d’être tenus par eux dans un siége perpétuel ; qui convions les nations à l’indépendance, et qui les abandonnons à leurs despotes ; qui faisons la guerre à nos voisins et à nos alliés, aujourd’hui pour la vengeance d’un prêtre, hier pour le plaisir d’une courtisane ; qui n’avons d’estime que pour nos flatteurs, de respect que pour nos parasites, d’amour que pour nos prostitués, de haine que pour nos travailleurs et nos pauvres ; race autrefois de héros, maintenant race de tartufes et de sycophantes : s’il est vrai que nous sommes le Christ des nations, puissions-nous donc épuiser bientôt le calice de nos iniquités ; ou bien, si nous avons décidément abdiqué la liberté, servir, à force de misères, d’éternel exemple aux peuples lâches et aux parjures !


XV.


BANQUE DU PEUPLE.


La société, me disait mon ami Villegardelle, un an avant la révolution de février, est malade d’une maladie qui tuera les médecins. Avis aux entrepreneurs de réformes !

Jamais on ne fut si bon prophète que mon ami Villegardelle. Ledru-Rollin, le père du suffrage universel, est en exil ; Louis Blanc, qui posa la question du travail garanti, en exil ; Considérant, le successeur de Fourier, en exil ; Cabet, le fondateur d’Icarie, jugé comme escroc, émigré, et moi, le théoricien du crédit gratuit, en prison. Je passe sous silence les quelque mille autres, qui sont morts, qui ont souffert, qui souffrent encore pour la République.