des banques, des hypothèques, des compagnies industrielles, auxquelles il faut joindre la centralisation politique, qui leur sert de sanction coercitive et pénale, il est évident que la nation française est livrée sans défense, de par la loi, à l’exploitation d’une oligarchie non prévue par les révolutionnaires de 89, et qui est née spontanément du jeu mal dirigé des forces économiques. Que ce régime, véritablement aléatoire, se prolonge encore cinquante ans, et la petite industrie, comme la petite propriété, sera peu à peu abolie : il n’y aura plus qu’une masse énorme de mercenaires, au service des seigneurs terriens, des barons de la vigne, du rail, de la houille, du fer, du coton, etc. La société se retrouvera divisée en deux castes, l’une d’exploitants, l’autre d’exploités : la classe moyenne tout entière aura disparu...
La nation acceptera-t-elle, subira-t-elle, contrairement à son caractère et à ses tendances, la condition anormale que l’imprévoyance de ses chefs lui prépare ? Consentira-t-elle, par peur du communisme, à revenir à l’ancien état féodal ? Non, non. La France ne veut pas plus du servage que de la communauté : ce qu’elle demande, c’est un système d’équilibre où chaque famille soit assurée d’obtenir, moyennant travail, un bien-être légitime. Pour tout le reste, liberté entière d’opinions et facilité d’accommodements.
Déjà, quelques jalons ont été posés sur cette ligne.
C’est ainsi qu’après avoir repoussé la définition de la propriété par Robespierre, qui en faisait une concession de l’État, nous avons rejeté en 1848 celle du droit romain, qui l’adjugeait au premier-occupant. Pour nous, la propriété ne vient ni de la conquête ni de l’État : elle est le produit du travail. Sous ce rapport, la Constitution de 1848 est diamétralement opposée au Code civil : d’après celui-ci, la propriété dérivant du droit quiritaire, est le droit absolu d’user et d’abuser ; d’après celle-là, la propriété n’est plus qu’une attribution du citoyen, sous la garantie du travail