Page:Proudhon - Les Confessions d'un révolutionnaire.djvu/51

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que tout était fait, et l’on s’occupa de rétablir le pouvoir, mais seulement sur d’autres bases. Le pouvoir s’était toujours, et avec raison, posé comme étant de droit divin : on prétendit, chose étrange, qu’il émanât du droit social, de la souveraineté du peuple. On s’imaginait, à l’aide d’un mensonge, réconcilier le pouvoir avec le progrès : on fut bientôt détrompé.

Convention. — Ce qui vient de Dieu ne saurait être revendiqué par l’homme. Le pouvoir demeura ce qu’il était : le fils légitime de Jupiter ne pouvait être que l’enfant bâtard de la souveraineté du peuple. Louis XVI, devenu, malgré lui monarque constitutionnel, fut le plus grand ennemi de la Constitution, au demeurant le plus honnête homme du monde. Était-ce sa faute ? En confirmant sa légitimité héréditaire, la Constitution reconnaissait implicitement en lui le droit qu’elle avait prétendu abroger ; et ce droit était en contradiction formelle avec la teneur du contrat. Le conflit était donc inévitable entre le prince et la nation. À peine la nouvelle Constitution est mise en vigueur, que le gouvernement se remit à faire obstacle à la Révolution. Nouveau converti, il ne pouvait s’habituer aux fictions constitutionnelles. Que dis-je ? c’était dans la Constitution même, qu’il trouvait les moyens de résister à la Révolution. Il fallut une autre journée pour vaincre cet esprit réfractaire, qui n’allait à rien de moins qu’à invoquer, contre des sujets rebelles, le secours de l’étranger. Le 10 août 1792 fut joué, entre les hommes du mouvement et ceux de la résistance, le second acte de la Révolution.

De ce moment, la volonté du peuple ne rencontrant plus d’obstacle, la Révolution parut s’établir en souveraine. Pendant quelques années la Convention, à qui le pouvoir avait été dévolu avec mission de protéger la liberté conquise, et de refaire la Constitution politique, vécut de l’énergie que lui avaient donnée l’insurrection du 10 août, les menaces