de si grands maux, il fallut courir aux grands remèdes. La nation, inconséquente, répudia son élu. La cause du despote fut séparée de celle du pays. La colère était si grande, l’indignation si générale, qu’on vit un peuple, le plus fier de la terre, tendre les bras à ses envahisseurs. Les tribuns du peuple couraient à Gand, comme autrefois les courtisans de la Monarchie avaient couru à Coblentz : Waterloo fut l’autel expiatoire qui nous rendit la liberté.
On redit, depuis Homère, que les peuples pâtissent des sottises des rois : Quidquid délirant reges, plectuntur Achivi. C’est plutôt le contraire qui est vrai. L’histoire des nations est le martyrologe des rois : témoin Louis XVI, Robespierre et Napoléon. Nous en verrons bien d’autres.
Restauration. — Bonaparte tombé, on se promit de régler, par un pacte efficace, les conditions du pouvoir. Nous eûmes la Charte. Quel était le principe de la Charte ? Il faut le rappeler.
Oublieux de la Révolution qui l’avait pris pour chef, Bonaparte avait fait d’un pouvoir populaire un pouvoir d’usurpation. Magistrat irréprochable tant qu’il fut premier consul, il ne parut plus sur le trône que le ravisseur du bien d’autrui. Qu’arriva-t-il ? La Restauration se posa en pouvoir légitime. C’est en 1814, pour la première fois, que l’absolutisme prit ce sobriquet. L’empereur n’emporta point avec lui l’absolutisme à l’île d’Elbe : il nous le laissa avec la Restauration. Or, qu’entendait-on restaurer ? deux choses incompatibles : la royauté de droit divin, représentée par la famille proscrite des Bourbons et la noblesse émigrée ; le système constitutionnel essayé après 89, et renversé au 10 août. La Charte de 1814, octroyée en apparence par le prince, mais tacitement imposée par le pays, ne fut qu’un retour aux idées de 1790, violemment refoulées par les agitations révolutionnaires, et qui, n’ayant pas eu le temps de se développer, demandaient à faire leur temps.