Page:Proudhon - Manuel du Spéculateur à la Bourse, Garnier, 1857.djvu/303

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Le système de canalisation est loin d’être complet. Aussi les travaux projetés dépassent-ils de beaucoup en importance ceux déjà accomplis.

Le développement qu’ont pris et auquel sont appelés les chemins de fer semble devoir jeter un discrédit sur la navigation intérieure. C’est une concurrence menaçante. La rapidité des transports de la voie ferrée est un appât auquel pour le moment tout le monde se laisse entraîner. Si ce mouvement continue, les canaux seront sans doute momentanément désertés.

Toutefois, le poids énorme que la batellerie peut transporter avec peu de matériel paraît devoir lui conserver longtemps sur les chemins de fer l’avantage du bon marché. La vitesse extrême des expéditions n’est pas un élément de valeur pour tous les produits. On amène aujourd’hui à Paris, en huit ou dix heures, de vingt à trente lieues et plus, des pierres, des solives, des fers, qui obstruent des semaines entières les gares des chemins de fer, et restent ensuite six mois, un an, avant d’être employés. Le bénéfice de la célérité n’est point en ce cas une compensation à la cherté du transport. Les houilles, les bois, les grains, les métaux, les matériaux de construction, matières encombrantes et fort lourdes, continueront de choisir, pensons-nous, les voies navigables.

Les progrès d’économie et les perfectionnements dont la traction des chemins de fer est susceptible sont applicables à la navigation. Aussi doit-il y avoir place pour la batellerie à côté des railsways. La concurrence entre ces deux espèces d’entreprises importe au plus haut point au commerce, déjà menacé d’un exhaussement de tarif par la coalition et la fusion des grandes compagnies de chemins de fer.

Les canaux furent creusés par l’État. Seulement il fallut, pour subvenir aux dépenses, recourir au crédit privé.

À cet effet, les lois des 5 août 1821 et 14 août 1822 sanctionnèrent les traités passés par le ministre avec cinq Compagnies, et par lesquels le gouvernement empruntait une somme de 126,100,000 fr. Ces emprunts ne furent point contractés dans la forme ordinaire de ceux dont nous avons parlé au chapitre de la Dette publique.