Page:Proudhon - Qu’est-ce que la propriété.djvu/123

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dictoire, hostile à la liberté, fautrice de tyrannie antisociale, et conçue fatalement sous l’influence catégorique du préjugé propriétaire.

Et d’abord le capital doit être rayé des éléments de la rétribution. Les fouriéristes, autant que j’ai pu m’en instruire par quelques-unes de leurs brochures, nient le droit d’occupation et ne reconnaissent d’autre principe de propriété que le travail : avec une semblable prémisse, ils auraient compris, s’ils avaient raisonné, qu’un capital ne produit à son propriétaire qu’en vertu du droit d’occupation, partant que cette production est illégitime. En effet, si le travail est le seul principe de la propriété, je cesse d’être propriétaire de mon champ à mesure qu’un autre exploitant m’en paye un fermage ; nous l’avons invinciblement démontré : or, il en est de même de tous les capitaux ; en sorte que placer un capital dans une entreprise, c’est, selon la rigueur du droit, échanger ce capital contre une somme équivalente de produits. Je ne rentrerai pas dans cette discussion désormais inutile, me proposant d’ailleurs de traiter à fond, au chapitre suivant, de ce qu’on appelle produire par un capital.

Ainsi le capital peut être échangé ; il ne peut être une source de revenu.

Restent le travail et le talent, ou, comme dit Saint-Simon, les œuvres et les capacités. Je vais les examiner l’un après l’autre.

Les appointements doivent-ils être proportionnés au travail ? en d’autres termes, est-il juste que qui plus fait, plus obtienne ? Je conjure le lecteur de redoubler ici d’attention.

Pour trancher d’un seul coup le problème, il suffit de se poser la question suivante : Le travail est-il une condition ou un combat ? La réponse ne me semble pas douteuse.

Dieu a dit à l’homme : Tu mangeras ton pain à la sueur de ton visage, c’est-à-dire, tu produiras toi-même ton pain : avec plus ou moins de plaisir, selon que tu sauras diriger et combiner tes efforts, tu travailleras. Dieu n’a pas dit : Tu disputeras ton pain à ton prochain ; mais, tu travailleras à côté de