Page:Proudhon - Qu’est-ce que la propriété.djvu/238

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Cependant l’erreur détruite supposant nécessairement une vérité contraire, je ne terminerai pas ce mémoire sans avoir résolu le premier problème de la science politique, celui qui préoccupe aujourd’hui toutes les intelligences :

La propriété abolie, quelle sera la forme de la société ? sera-ce la communauté ?


Seconde partie.


§ 1. Des causes de nos erreurs : origine de la propriété.


La détermination de la véritable forme de la société humaine exige la solution préalable de la question suivante :

La propriété n’étant pas notre condition naturelle, comment s’est-elle établie ? comment l’instinct de société, si sûr chez les animaux, a-t-il failli dans l’homme ? comment l’homme, né pour la société, n’est-il pas encore associé ?

J’ai dit que l’homme est associé en mode composé : lors même que cette expression manquerait de justesse, le fait qu’elle m’a servi à caractériser n’en serait pas moins vrai, savoir l’engrenage des talents et des capacités. Mais qui ne voit que ces talents et ces capacités deviennent à leur tour, par leur variété infinie, causes d’une infinie variété dans les volontés ; que le caractère, les inclinations, et si j’ose ainsi dire, la forme du moi, en sont inévitablement altérés : de sorte que dans l’ordre de la liberté, de même que dans l’ordre de l’intelligence, on a autant de types que d’individus, autant d’originaux que de têtes, dont les goûts, les humeurs, les penchants, modifiés par des idées dissemblables, nécessairement ne peuvent s’accorder ? L’homme, par sa nature et son instinct, est prédestiné à la société, et sa personnalité, toujours inconstante et multiforme, s’y oppose.

Dans les sociétés d’animaux, tous les individus font exactement les mêmes choses : un même génie les dirige, une