Page:Proudhon - Qu’est-ce que la propriété.djvu/249

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sible par l’émulation d’acquérir, la communauté le deviendrait bientôt par l’émulation de fainéantise.

II. La propriété, à son tour, viole l’égalité par le droit d’exclusion et d’aubaine, et le libre arbitre par le despotisme. Le premier effet de la propriété ayant été suffisamment développé dans les trois chapitres précédents, je me contenterai d’établir ici, par un dernier rapprochement, sa parfaite identité avec le vol.

Voleur se dit en latin fur et latro, le premier pris du grec phôr, de pherô, latin fero, j’emporte ; le second de lathroô, je fais le brigand, dont le primitif est léthô, latin lateo, je me cache. Les Grecs ont encore kleptês, de kleptô, je dérobe, dont les consonnes radicales sont les mêmes que celles de kaluptô, je couvre, je cache. D’après ces étymologies, l’idée de voleur est celle d’un homme qui cache, emporte, distrait une chose qui ne lui appartient pas, de quelque manière que ce soit.

Les Hébreux exprimaient la même idée par le mot gannab, voleur, du verbe ganab, qui signifie mettre à part, détourner : lo thi-gnob (Décalogue, 8e commandement), tu ne voleras pas, c’est-à-dire, tu ne retiendras, tu ne mettras de côté rien pour toi. C’est l’acte d’un homme qui, entrant dans une société où il promet d’apporter tout ce qu’il a, en réserve secrètement une partie, comme fit le célèbre disciple Ananie.

L’étymologie de notre verbe voler est encore plus significative. Voler, ou faire la vole, du latin vola, paume de la main, c’est faire toutes les levées au jeu d’hombre ; en sorte que le voleur est comme un bénéficiaire qui prend tout, qui fait le partage du lion. Il est probable que ce verbe voler doit son origine à l’argot des voleurs, d’où il aura passé dans le langage familier, et, par suite, jusque dans le style des lois.

Le vol s’exerce par une infinité de moyens, que les législateurs ont très habilement distingués et classés, selon leur degré d’atrocité ou de mérite, afin que dans les uns le vol fût honoré, et dans les autres puni.

On vole : 1o en assassinant sur la voie publique ; 2o seul ou