des objets nécessaires, et si, en croyant favoriser la classe la plus nombreuse, vous ne rendriez pas pire la condition générale ? La belle spéculation, en vérité ! On rendra 20 francs au travailleur sur le vin et le sucre, et on lui en prendra 40 sur ses plaisirs. Il gagnera 75 c. sur le cuir de ses bottes, et pour mener sa famille quatre fois par an à la campagne, il payera 6 fr. de plus pour les voitures ! Un petit bourgeois dépense 600 fr. pour la femme de ménage, la blanchisseuse, la lingère, les commissionnaires ; et si, par une économie mieux entendue et qui accommode tout le monde, il prend une domestique, le fisc, dans l’intérêt des subsistances, punira cette pensée d’épargne ! Que c’est chose absurde, quand on y regarde de près, que la philanthropie des économistes !
Cependant je veux contenter votre fantaisie ; et puisqu’il vous faut absolument des lois somptuaires, je prétends vous donner la recette. Et je vous certifie que dans mon système la perception sera facile : point de contrôleurs, de répartiteurs, de dégustateurs, d’essayeurs, de vérificateurs, de receveurs ; point de surveillance ni de frais de bureaux ; pas la moindre vexation ni la plus légère indiscrétion ; pas une contrainte. Qu’il soit décrété par une loi que nul à l’avenir ne pourra cumuler deux traitements, et que les plus forts honoraires, dans tous les emplois, ne pourront dépasser, à Paris, 6,000 fr., et dans les départements, 4,000. Eh quoi ! vous baissez les yeux !… Avouez-donc que vos lois somptuaires ne sont qu’une hypocrisie.
Pour soulager le peuple, quelques-uns font à l’impôt l’application de la routine commerciale. Si, par exemple, disent-ils, le prix du sel était réduit de moitié, si le port des lettres était dégrevé dans la même proportion, la consommation ne manquerait pas de s’élever, la recette serait plus que doublée, le fisc gagnerait, et le consommateur avec lui.
Je suppose que l’événement confirme cette prévision, et je dis : Si le port des lettres était diminué des trois quarts, et si le sel se donnait pour rien, le fisc gagnerait-il encore ? Non, assurément. Quel est donc le sens de ce qu’on appelle la réforme postale ? C’est qu’il est pour chaque espèce de produit un taux naturel, au-dessus duquel le bénéfice devient usuraire et tend à faire décroître la consommation,