Page:Proudhon - Systeme des contradictions economiques Tome 1, Garnier, 1850.djvu/331

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là sur la vente de l’étal d’un boucher s’applique à toute charge quelconque ayant un titre vénal. »

Les raisons de M. Horace Say, pour l’abolition du privilége de la boucherie, sont sans réplique : de plus, elle s’appliquent aux imprimeurs, notaires, avoués, huissiers, greffiers, commissaires-priseurs, courtiers, agents de change, pharmaciens et autres, aussi bien qu’aux bouchers. Mais elles ne détruisent pas les raisons qui ont fait adopter ces monopoles, et qui se déduisent généralement du besoin de sécurité, d’authenticité, de régularité pour les transactions, comme des intérêts du commerce et de la santé publique. — Le but, dites-vous, n’est pas atteint. — Mon Dieu ! je le sais : laissez la boucherie à la concurrence, vous mangerez des charognes ; établissez un monopole de la boucherie, vous mangerez des charognes. Voilà l’unique fruit que vous puissiez espérer de votre législation de monopole et de brevets.

Abus ! s’écrient les économistes réglementateurs. Créez pour le commerce une police de surveillance, rendez obligatoires les marques de fabrique, punissez la falsification des produits, etc.

Dans la voie où la civilisation est engagée, de quelque côté que l’on se tourne, on aboutit donc toujours, ou au despotisme du monopole, par conséquent à l’oppression des consommateurs ; ou bien à l’annihilation du privilége par l’action de la police, ce qui est rétrograder dans l’économie, et dissoudre la société en détruisant la liberté. Chose merveilleuse ! dans ce système de libre industrie, les abus, comme une vermine pédiculaire, renaissant de leurs propres remèdes, si le législateur voulait réprimer tous les délits, surveiller toutes les fraudes, assurer contre toute atteinte les personnes, les propriétés, et la chose publique, de réforme en réforme, il arriverait à multiplier à tel point les fonctions improductives que la nation entière y passerait, et qu’à la fin il ne resterait personne pour produire. Tout le monde serait de la police : la classe industrielle deviendrait un mythe. Alors, peut-être, l’ordre régnerait dans le monopole.

« Le principe de la loi à faire sur les marques de fabrique, dit M. Renouard, est que ces marques ne peuvent ni ne doi-