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Page:Proudhon - Systeme des contradictions economiques Tome 1, Garnier, 1850.djvu/336

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en outre intéresser le consommateur à la répression de la fraude ; ce qui, tant que le producteur n’aura pas été pleinement désintéressé, est tout à la fois impossible et contradictoire. Impossible : posez d’une part un consommateur dépravé, la Chine ; de l’autre un débitant aux abois, l’Angleterre ; entre deux, une drogue vénéneuse procurant l’exaltation et l’ivresse ; et malgré toutes les polices du monde, vous aurez le commerce de l’opium. — Contradictoire : dans la société le consommateur et le producteur ne font qu’un, c’est-à-dire que tous deux sont intéressés à produire ce dont la consommation leur est nuisible ; et comme pour chacun la consommation suit la production et la vente, tous pactiseront pour sauvegarder le premier intérêt, sauf à se mettre respectivement en garde sur le second.

La pensée qui a suggéré les marques de fabrique est de même souche que celle qui, autrefois, dicta les lois de maximum. C’est encore ici un des innombrables carrefours de l’économie politique.

Il est constant que les lois de maximum, toutes faites et très-bien motivées par leurs auteurs dans la vue de remédier à la disette, ont eu pour résultat invariable d’empirer la disette. Aussi, n’est-ce pas d’injustice ou de mauvais vouloir que les économistes les accusent, ces lois abhorrées, c’est de maladresse, d’impolitique. Mais quelle contradiction dans la théorie qu’ils leur opposent !

Pour remédier à la disette, il faut appeler les subsistances, ou pour mieux dire, les faire paraître au jour ; jusque-là, rien à reprendre. Pour que les subsistances se produisent, il faut attirer les détenteurs par le bénéfice, exciter leur concurrence, et leur assurer liberté complète sur le marché : ce procédé ne vous semble-t-il pas de la plus absurde homéopathie ? Comment concevoir que plus aisément on pourra me rançonner, plutôt je serai pourvu ? Laissez faire, dit-on, laissez passer ; laisser agir la concurrence et le monopole, surtout dans les temps de disette, et alors même que la disette est l’effet de la concurrence et du monopole. Quelle logique ! mais surtout quelle morale !

Mais pourquoi donc ne ferait-on pas un tarif pour les fermiers, comme il en existe un pour les boulangers ? Pourquoi