Page:Proudhon - Systeme des contradictions economiques Tome 2, Garnier, 1850.djvu/33

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produites aient été constituées et déterminées comme la monnaie (si tant est que cette constitution puisse jamais être définitive), l’argent conserve sa royauté, et c’est de lui seul qu’on peut dire qu’accumuler de la richesse, c’est accumuler du pouvoir.

Lors donc que les économistes, confondant toutes ces notions, disent que si l’argent est rare dans un pays, il y revient appelé par la hausse, je réponds que c’est précisément la preuve que ce pays s’aliène, que c’est en cela que consiste la désertion de son capital.

Et lorsqu’ils ajoutent que les capitaux métalliques accumulés sur un point par une exportation supérieure, sont forcés de s’expatrier ensuite et de revenir sur les points vides afin d’y chercher de l’emploi, je réplique que ce retour est justement le signe de la déchéance des peuples importateurs, et l’annonce de la royauté financière qu’ils ont attirée sur eux.

Au reste, le phénomène si important de la subalternisation des peuples par le commerce n’a échappé aux économistes que parce qu’ils se sont arrêtés à la superficie du fait, et qu’ils n’en ont pas scruté les lois et les causes. Quant à la matérialité de l’événement, ils l’ont aperçue : ils ne se sont mépris que sur la signification et les conséquences. Sur ce point, comme sur tous les autres, c’est encore dans leurs écrits qu’on trouve rassemblées toutes les preuves qui les accablent.

Je lis dans les Débats du 27 juillet 1845, que la valeur des exportations de la France en 1844 a été de 40 millions inférieure à celle des importations, et qu’en 1843 cette même différence avait été de 160 millions. Ne parlons pas des autres années : je demande à l’auteur de l’article, qui n’a pas manqué cette occasion de desserrer une ruade au système mercantile, ce qu’il est advenu de ces 200 millions en espèces, qui ont servi d’appoint, et que la France a payés ? — La hausse des capitaux dans notre pays a dû les faire revenir : voilà ce qu’il doit répondre, d’après J. B. Say. — Il paraît en effet qu’ils sont revenus : toute la presse politique et industrielle nous a appris qu’un tiers des capitaux engagés dans nos chemins de fer, pour ne citer ici que cette branche de spéculation, étaient des capitaux suisses, anglais, allemands ; que les conseils d’administration desdits chemins de fer étaient formés en partie d’étrangers, présidés par des étrangers, et que plusieurs voies, la plus productive entre