Page:Proudhon - Théorie de l impôt, Dentu, 1861.djvu/35

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payent qu’à moitié de leur valeur. De même, dans les voyages du roi, on prend pour son service les chevaux des paysans, et on en paye arbitrairement l’usage. »

Richelieu, cité par J.-B. Say, dit crûment : « Le peuple n’est point taxé ; il est pillé. Les fortunes ne se font pas par l’industrie, mais par la rapine. » Richelieu, ajoute Say, était assez sûr de son pouvoir pour être impunément effronté. Mazarin se contenta de piller sans le dire.

C’est vers ce temps que la bourgeoisie, devenue riche, se met à rechercher l’anoblissement. En prenant des lettres de noblesse, que le roi faisait payer cher, elle devenait, comme les seigneurs féodaux, exempte d’impôt. L’anoblissement était un rachat, bien plus, un droit à la faveur du prince et à la participation au trésor public. Unis par mariage et par la communauté de privilége, le bourgeois et le noble pouvaient-ils encore parler de mésalliance ?

Ainsi, à mesure que le malheureux serf, vaincu par les coups, la faim et la misère, devient plus laborieux, plus intelligent, plus moral, à mesure qu’il se décrasse et se civilise, ses maîtres se dépravent et leur conduite devient plus atroce. Il n’y a nulle comparaison à faire entre les mœurs seigneuriales du xve, du xvie et du xviie siècle, et celles du temps de Charlemagne, quand le baron mangeait avec ses hommes, dans la même salle, leur donnant à tous le vivre et la paille, et ne demandant au colon devenu serf que ce qu’autorisait l’usage établi. Et comme si la royauté, que nous avons vue tout à l’heure, sous Louis X et Phi-