Page:Proudhon - Théorie de la propriété, 1866.djvu/238

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

propriétaire de la terre : comment une nation, comment un particulier se dirait-il souverain de la portion qui lui est échue ? Ce n’est pas l’humanité qui a créé le sol : l’homme et la terre ont été créés l’un pour l’autre et relèvent d’une autorité supérieure. Nous l’avons reçue, cette terre, en fermage et usufruit : elle nous a été donnée pour être possédée, exploitée par nous solidairement et individuellement, sous notre responsabilité collective et personnelle. Nous devons la cultiver, la posséder, eu jouir, non pas arbitrairement, mais selon des règles que la conscience et la raison découvrent, et pour une fin qui dépasse notre plaisir : règles et fin qui excluent tout absolutisme de notre part, et reportent le domaine terrien plus haut que nous. L’homme, dit un jour un de nos évêques, est le contre-maître du globe. Cette parole a été beaucoup louée. Or, elle n’exprime pas autre chose que ce que je viens de dire, que la propriété est supérieure à l’humanité, surhumaine, et que toute attribution de ce genre, à nous pauvres créatures, est usurpation.

Tous nos arguments en faveur d’une propriété, c’est-à-dire d’une souveraineté éminente sur les choses, n’aboutissent qu’à prouver la possession, l’usufruit, l’usage, le droit de vivre et de travailler, rien de plus.

Il faut arriver toujours à conclure que la propriété est une vraie fiction légale ; seulement il pourrait se faire que cette fiction fût telle dans ses motifs que nous dussions la regarder comme légitime. Sans cela nous