Page:Proust - Pastiches et Mélanges, 1921.djvu/67

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de celui-ci une considération qu’il n’accordait à pas un autre, et que c’étaient eux — je ne me contraignis pas à nommer Effiat — qui, aidés de Mirepoix et de la Mouchi, avaient frayé un chemin au Moine ; que n’ayant pour tout bouclier que des hommes qui ne comptaient plus depuis la mort de Monsieur et ne l’avaient pu pendant sa vie que par l’horrible conviction où était chacun, et jusqu’au roi qui avait ainsi fait le mariage de Mme d’Orléans, qu’on obtenait tout d’eux par l’argent, et de lui par eux entre les mains de qui il était, on ne craindrait pas de l’atteindre par la calomnie la plus odieuse, la plus touchante, qu’il n’était que temps, s’il l’était encore, qu’il relevât enfin sa grandeur et pour cela un seul moyen, prendre dans le plus grand secret les mesures pour faire arrêter Le Moine et, aussitôt la chose décidée, n’en point retarder l’exécution et ne le laisser de sa vie rentrer en France.

M.  le duc d’Orléans, qui s’était seulement écrié une ou deux fois au commencement de ce discours, avait ensuite gardé le silence d’un homme anéanti par un si grand coup ; mais mes derniers mots en firent sortir enfin quelques-uns de sa bouche. Il n’était pas méchant et la résolution n’était pas son fort :

— Eh quoi ! me dit-il d’un ton de plainte, l’arrêter ? Mais enfin si son invention était vraie ?

— Comment, Monsieur, lui dis-je étonné au dernier point d’un aveuglement si extrême et si pernicieux, vous en êtes là, et si peu de temps après avoir été détrompé sur l’écriture du faux marquis de Ruffec. Mais enfin, si vous avez seulement un doute, faites venir l’homme de France qui se connaît le mieux à