Page:Proust - Pastiches et Mélanges, 1921.djvu/82

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tourna cette fatigue en distinction. Mme la duchesse de Bourgogne la venait voir et ne voulait pas être conduite au delà de la première pièce. Elle recevait les duchesses, assise, qui la visitaient tout de même tant c’était un délice de l’écouter. Montesquiou ne s’en faisait pas faute ; il était fort aussi dans la familiarité de Mme Standish, sa cousine, qui vint à ce parvulo de Saint-Cloud, étant l’amie la plus anciennement admise en tout et dans la plus grande proximité avec la reine d’Angleterre, la plus distinguée par elle, où toutes les femmes ne lui cédèrent point le pas comme cela aurait dû être et ne fut pas par l’incroyable ignorance de M. le duc d’Orléans, qui la crut peu de chose parce qu’elle s’appelait Standish, alors qu’elle était fille d’Escars, de la maison de Pérusse, petite-fille de Brissac, et une des plus grandes dames du royaume comme aussi l’une des plus belles et avait toujours vécu dans la société la plus trayée dont elle était le suprême élixir. M. le duc d’Orléans ignorait aussi que H. Standish était fils d’une Noailles, de la branche des marquis d’Arpajon. Il fallut que M. d’Hinnisdal le lui apprît. On eut donc à ce parvulo le scandale fort remarquable du prince Murat, sur un ployant, à côté du roi d’Angleterre. Cela fit un étrange vacarme qui retentit bien loin de Saint-Cloud. Ceux qui avaient à cœur le bien de l’État en sentirent les bases sapées ; le Roi, si peu versé dans l’histoire des naissances et des rangs, mais comprenant la flétrissure infligée à sa couronne par la faiblesse d’avoir anéanti la plus haute dignité du royaume, attaqua de conversation là-dessus le comte A. de La Rochefoucauld, qui l’était plus que personne et qui, commandé de