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Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/162

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spirituelle celle-là, du capitaine Nangès. Comment s’étonner de voir le brave Timothée s’oublier jusqu’à faire le pédagogue ? N’a-t-il pas cette manie de domination qui est la marque de tout militaire ? Et comment n’eût-il pas voulu s’emparer complètement de la neuve intelligence de son disciple ? Aussi, de temps en temps, le faisait-il venir chez lui… Étrange complicité ! Timothée, lui, apprenait de la seule présence de Vincent. Il apprenait de s’entendre parler lui-même. Quant au jeune homme, le but de ces conférences était de lui donner une forte nourriture mathématique qui, plus tard, pourrait lui être utile.

Dans la petite salle du deuxième étage, toute blanche, ornée de cartes, avec un grand tableau noir sur un chevalet, Timothée Nangès alignait des chiffres. Il se passionnait vite à ce jeu et affirmait, oubliant son élève, que « le problème posé était plus facile à résoudre par les intégrales ». Et le voilà, bafouillant, avec une science inouïe, d’interminables formules ! Maurice, las et la tête lourde, suivait son capitaine d’un œil vague. Il avait envie de dormir… Mais bientôt une causerie ardente les transfigurait. Timothée parlait de tout,