Aller au contenu

Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/167

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Maurice se dirigea vers le rebord sud de la plate-forme. De là, il voyait au loin les lumières de Cherbourg. Les globes électriques des quais n’éclairaient que des solitudes. Mais aux fenêtres des maisons, des lumières plus douces brillaient et annonçaient les endroits où était la vie. Et alors, dans la nuit livide, son cœur se mouilla d’une tendresse désespérée. Il pensa avec plus d’indulgence à la lettre. Oui, il l’avait bien aimée autrefois, la maison paternelle, la petite maison d’école de Voulangis, avec ses glycines et sa grande cour de sable fin, toute nue et simple, où s’ébattaient, matin et soir, les petits pouilleux et les petites morveuses du bourg. Il est des heures qui ne s’oublient pas. Aucune, hélas ! ne s’oublie. Comment rayer le beau passé, et la douceur des soirs, tous ensemble, sous la lampe, et le calme des jours d’enfance, près de la mère et du père ?

Bientôt les galons rouges vont orner les manches de l’enfant prodigue, et il ira au pays. Déjà, malgré la trahison du foyer, il espère revoir les frais horizons de sa vie antérieure. Il pense à la rivière, prisonnière dans ses parcs rustiques, à la route qui monte vers