Page:Psichari - Le Voyage du centurion (1916).djvu/104

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Il a derrière lui vingt mille croisés, — tout un peuple qui est mort l’épée dressée, la prière clouée sur les lèvres. Il est l’enfant de ce sang-là. Ce n’est pas en vain qu’il a souffert les premières heures de l’exil, ni que le soleil l’a brûlé, ni que la solitude l’a enseveli sous ses grands voiles de silence. Il est l’enfant de la souffrance.

« Tu n’es pas le premier, dit une voix qu’il ne connaissait pas — et c’est celle de la mère qu’il maudite — tu n’es pas le premier que j’envoie sur cette terre infidèle. J’en ai envoyé d’autres avant toi. Car cette terre est à moi et je la donne à mes fils pour qu’ils y souffrent et qu’ils y apprennent la souffrance. D’autres sont morts avant toi. Et ils ne demandaient pas à ces esclaves de leur apprendre à vivre. Mais ils portaient devant eux leur cœur, entre leurs mains. Regarde, ô mon fils, comme ils