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Page:Pujo - Phyllis, 1922.djvu/114

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PHYLLIS

— Phyllis, je réponds de vous devant votre mari, n’allez pas trop vite, ne vous cassez pas les membres et soyez raisonnable.

Je répondis en riant :

— Non, Harriett, j’ai l’intention d’aller comme le vent, de m’amuser beaucoup et d’être très déraisonnable !

Malgré mes intentions audacieuses, je piétinai piteusement pendant le premier tour de piste, mais peu à peu je me raffermis sur mes patins, nous accélérâmes la vitesse, et je me déclarai enchantée.

— Je vais me reposer tout de même un peu, fis-je en me laissant tomber tout essoufflée sur une chaise. Je ne me souvenais pas à quel point c’était difficile.

« Continuez, sir Francis, faites un tour tout seul ou invitez une autre dame. Quand vous en aurez assez de flirter, nous recommencerons.

Il partit.

— Ah ! voilà sir Francis ; il a déniché une patineuse, dit Harriett, et elle va joliment bien ! Qui cela peut-il être ? je connais tout le Comté et une femme aussi belle et d’une telle élégance n’aurait pu passer inaperçue… Ce doit être une étrangère…

Une sourde appréhension s’empara de moi. Je suivis d’un œil inquiet les évolutions de la patineuse qui était évidemment de première force.

Tout en glissant avec la plus grande aisance, elle causait d’un ton fort animé avec mon ex-patineur.

— Ma chère, me dit Blanche en les désignant du bout du menton, je crois que votre adorateur habituel vous fait infidélité.

— Mais qui est-ce ? repris-je, quelqu’un la connaît-il ?

— Sir Francis vous le dira. Le voici.

Il revenait vers notre groupe après avoir salué la jeune femme qui lui tendit sa main et lui donna un vigoureux shake-hand, en le gratifiant d’un sourire de toutes ses dents éblouissantes.

J’allais le questionner sur sa nouvelle conquête, mais avant qu’il pût me rejoindre, sir Garlyle était happé par les demoiselles Hastings et leur amie Lucy Leslie qui entraient en bande au skating. Sur une invitation de mon ancien amoureux, Hastings, je me levai de nouveau et repartis, cette fois bien d’aplomb.

Nous commencions notre second tour de piste et la conversation suivait son train. Cependant je cherchais autour de moi, absorbée par l’idée fixe de revoir une grande femme brune, à la magnifique prestance, à la belle tête altière, glissant comme un oiseau sur ses fines lames d’acier.