Page:Quatremère de Quincy - Considérations morales sur la destination des ouvrages de l’art, 1815.djvu/66

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décomposer les parties, comme on n’a cessé de le faire depuis vingt-cinq ans, que d’en recueillir les débris dans ces dépôts appelés Conservatoires.

Par quel étrange contre-sens appellerait-on de ce nom ces réceptacles de ruines factices qu’on ne semble vouloir dérober à l’action du temps, que pour les livrer à l’oubli ! Cessez, sophistes ignorans, de trouver du plaisir dans ces ruines ; oui, celles du temps sont respectables, celles de la barbarie font horreur. Les ruines du temps, ces monumens de la fragilité humaine, sont la leçon de l’homme, les autres en sont la honte. Cessez surtout de nous vanter l’ordre et l’arrangement qui régnent dans ces ateliers de démolition. À quelle triste destinée condamnez-vous les Arts, si leurs produits ne doivent plus se lier à aucun des besoins de la société, si des systèmes prétendus philosophiques leur ferment toutes les carrières de l’imagination, les privent de tous ces emplois que leur préparaient les croyances religieuses, les douces affections sociales, les consolans prestiges de la vanité humaine !

Ne nous dites plus que les ouvrages de l’Art se conservent dans ces dépôts. Oui, vous y en avez transporté la matière ; mais avez-vous pu transporter avec eux ce cortège de sensations tendres,