Page:Quatremère de Quincy - Considérations morales sur la destination des ouvrages de l’art, 1815.djvu/29

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si l’on cesse d’imposer à l’Art l’obligation d’exprimer la partie morale, qui est l’âme de l’ouvrage, aussitôt cesse pour lui la nécessité de s’élever à toute la perfection de la partie physique. Les figures, devenues des signes sans valeur, perdent Ie principe de vie qui leur est propre, le mobile de leur action sur le spectateur. L’imitation des corps doit dégénérer, à mesure que les corps sont dispensés d’être l’image de l’âme. La cause cessant, l’effet disparaît.


On ne saurait se dissimuler que les principes moraux, dont il semble qu’on ait pris à tâche d’affaiblir ou de détruire l’influence, dans toutes les institutions sociales, n’aient aussi été négligés dans le régime des Arts. Une nouvelle manière de les considérer a fait perdre le point de vue moral : et c’est à cette manière de voir, si l’on peut dire, matérialiste, qu’il faut attribuer ces froids systèmes d’encouragement, qui consistent à commander aux artistes des ouvrages sans emploi, sans destination déterminée.

Le fait seul d’un tel genre d’encouragement montre déjà le mal dont je parle, et, loin de le guérir, il l’aggrave, il prouve que les productions des Arts n’ont plus de cours dans la société. En effet, dès