Page:Quatremère de Quincy - Considérations morales sur la destination des ouvrages de l’art, 1815.djvu/91

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puissance de l’Art, tout parlait soit langage, tout recevait et rendait ses impressions. Chaque pas offrait un monument, et chaque monument donnait une leçon, retraçait un souvenir, excitait un sentiment ; c’est que chacun avait ses fondemens dans les mœurs, les habitudes du lieu, l’histoire du pays, les traditions locales.

Voilà les collections de monumens qui enflamment le génie, qui produisent des artistes, qui multiplient non-seulement les ouvrages, mais les besoins d’en créer et les moyens d’en jouir. L’âme y éprouve cette plénitude de jouissance que procurent la grandeur et la variété d’un spectacle infini, et l’esprit aussi peut s’y recueillir dans la contemplation isolée de chaque objet.


Je mets en effet au nombre des circonstances heureuses pour l’Art, pour l’artiste et pour le spectateur, que, dans le plus grand nombre des temples antiques, la statue de la divinité se trouvât seule, ou presque toujours seule habitante du lieu qui lui était consacré. Combien quelquefois cet isolement devait commander de perfection à l’artiste ! mais combien il devait aussi aider à la jouissance du spectateur ! Il n’y a personne, sans doute, qui n’ait