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CHANSONS ET DANSES DES BRETONS

ler, de chanson populaire sans mélodie. M. Luzel et M. de La Villemarqué n’avaient donc pas fermé la route, pour l’avoir occupée les premiers ; ils l’ont ouverte, au contraire, à tout venant de bonne volonté. J’ai entrepris d’ajouter à leurs recherches les miennes, sur le conseil d’un illustre et constant ami des Celtes ; plus d’une fois, M, Henri Martin m’a demandé pourquoi la Bretagne reste en arrière des Irlandais et des Gallois ; « Ceux-ci ont depuis longtemps leur répertoire populaire et national, ajoutait le regretté celtisant. Il y a pourtant chez les Bretons de si belles mélodies ! Je me rappelle que j’ai reçu tant de joie de les entendre au Congrès de Saint-Brieuc ! ... Et la mélopée de vos drames, j’en ai été aussi ému que d’un beau souvenir de l’antiquilé. »

Dans la préface de Marie, Brizeux supplie ses compatriotes qu’ils lui pardonnent d’avoir « enseigné le chemin de leurs bruyères et de leurs fontaines.» C’est que le peuple généralement ne voit rien de bon à ce» indiscrétions-là. Même aujourd’hui que la Bretagne est moins fermée aux « gens du dehors », et que la civilisation l’a percée d’outre en outre par ses voies ferrées, cela donne encore le plus grand mal d’arracher aux Bretons leur contes et leurs légendes. Pour la plupart, la révélation de ces « secrets » est une manière de trahison domestique : ils craignent des « étrangers » quelques duperies, ou’^^le rire des lettrés peut-être ; et c’est, pour d’autres, une futilité qui n’en vaut pas la peine. Ainsi aux environs de Quimperlé, où j’ai appris les plus charmants sonn d’amour, la couturière de qui je les ai entendus, les appelait des « imbécillités » : il est juste d’ajouter qu’elle avait un grand goût pour la Valse des Roses et d’autres chansons françaises de la même valeur poétique, N’est-ce pas en quelque chose le mol de Marie, lorsqu’elle apprit que Brizeux avait écrit d’elle une poétique histoire ? Elle en fut d’abord touchée, raconte quelque part M. de La Villemarqué ; puis, au bout d’une réflexion : « Au fait, répliqua-t-elle, cela ne m’étonne pas ; M. Auguste aimait toujours un peu à rire. »

Il est rare qu’on ne rencontre pas l’indifférence ou la méfiance même auprès des gens du peuple que l’on consulte pour la