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Les vers français diffèrent de la prose en trois points :

1o Ils ont un nombre limité et régulier de syllabes ;

2o Ils se terminent par la rime, c’est-à-dire par une consonnance pareille qui se trouve à la fin de deux vers au moins ;

3o Ils n’admettent pas l’hiatus, c’est-à-dire la rencontre de deux voyelles dont l’une finit un mot et l’autre commence le suivant, comme tu es, j’ai en. L’e muet est seul excepté.

Une syllabe est proprement la réunion d’une ou de plusieurs consonnes avec une ou plusieurs voyelles, comme la, il, les, nous, jeu, prix, etc. ; mais, par extension, le mot syllabe est pris pour synonyme de voyelle : ainsi l’on dit que le mot haï a deux syllabes.

Puisque les vers français ont un nombre fixe de syllabes, il faut apprendre, avant tout, à compter les syllabes des mots qui y figurent ou qu’on veut y faire entrer. Scander un vers, c’est le subdiviser successivement en toutes les syllabes dont il se compose.

Toute syllabe compte dans le vers, même l’e muet final, à moins qu’il ne soit suivi immédiatement d’une voyelle ou d’une h non aspirée. Exemples : L’homme-vient ; les hom-me-heu-reux. Mais l’on scandera : L’homme-a-droit ; l’homme-heu-reux. Dans ce cas l’e muet final se perd, ou, suivant l’expression propre, il s’élide. On dit encore qu’il y a élision de l’e muet.

Il faut avoir bien soin de rétablir, en scandant, les syllabes muettes que la rapidité de la prononciation ne fait pas ressortir dans le langage familier : feu-ille-ter, u-ne pe-ti-te ru-se. Il faut aussi diviser deux